Chomsky & Cie

Chomsky & Cie
Olivier Azam et Daniel Mermet

Dimanche 18 Janvier 2009
Séance Spéciale à 16h30

en présence d'Olivier AZAM




On connaît bien Daniel Mermet, le sympathique producteur et animateur de l’émission Là-bas si j’y suis. Voici qu’en compagnie d’Olivier Azam à la caméra il s’est mis en tête de brosser le portrait de Noam Chomsky. Ce dernier ayant son temps compté - il travaille cent heures par semaine alors qu’il va avoir quatre-vingts ans ce 7 décembre -, le croquis s’est ouvert à deux autres savants (d’où le titre), le Belge Jean Bricmont et le Québécois Normand Baillargeon. Dans ces entretiens, ce n’est pas tant le savoir scientifique de ces trois grands universitaires qui intéresse Mermet que leur capacité à fuir les idées reçues. Voici donc Mermet en route pour Boston en avril 2007, s’excusant presque, lui qui préfère d’habitude « plutôt les jetables que les notables, plutôt les routiers que les rentiers ». Pas facile non plus de classer Chomsky, « qui se situe quelque part entre Bertrand Russell et le sous-commandant Marcos ». Mais, très vite, la pensée fuse, alors que Chomsky compare les différences de traitement par la presse entre divers événements qui se sont déroulés ici et là, les milliers de mineurs massacrés au Chili, à Iquique en 1907, morts politiques qui n’ont laissé aucune trace, pendant que la trentaine dus à un déséquilibré à Virginia Tech remplit page après page les journaux. En France, Arlette Chabot, Carole Gaessler, Louis Laforge ou David Pujadas, à qui la question est posée, se sentent libres mais sont, pour Chomsky, parties prenantes d’une machine à décerveler, celui-ci ne leur accordant qu’une « possibilité de débat passionné dans un cadre précis ». Ce par le moyen de la démocratie libérale : « Obtenir sans violence ce que les États totalitaires obtiennent à coups de bâton ». À ce point, le film développe tout un travail sur le langage des mass media. Viennent ensuite les sujets qui fâchent ou ont pu fâcher, l’opposition entre le traitement de la question cambodgienne et celui de Timor-Est et, surtout, la polémique avec Pierre Vidal-Naquet suite à la préface donnée par Chomsky au livre de Faurisson. Où se limite la liberté d’expression ? Question passionnante que le film parcourt dans tous les sens.
Jean Roy






Théoricien du langage, né à Philadelphie en 1928, Noam Chomsky a révolutionné la linguistique avec la « grammaire générative ». Il est aussi un analyste politique engagé dans toutes les luttes politiques depuis des décennies. Ses analyses claires et rationnelles des mécanismes idéologiques de nos sociétés constituent une ressource fondamentale pour la pensée critique actuelle.

Auteur de dizaine de livres, de milliers d’interventions et d’ articles, qui font de lui l’auteur le plus cité dans le monde, « l’intellectuel planétaire le plus populaire » comme l’affirme Alain Finkielkraut, est beaucoup moins connu en France. En consultant par exemple les archives de Radio France depuis 40 ans, le nom de Chomsky n’apparaît que cinq fois pour de brèves interventions sur France Culture dans les années 70. Jamais il n’a été entendu sur France Inter.
A quoi tient ce passage sous silence ?
Même si depuis quelques années ses ouvrages sont passionnément suivis par un jeune public français, une série de penseurs médiatiques s’acharne à entretenir le soupçon. Chomsky aurait eu des complaisances avec l’historien négationniste Robert Faurisson, tout comme envers Pol Pot et les génocidaires cambodgiens. Dans ses analyses des structures de l’information comme de la politique étrangère américaine, Chomsky ne serait qu’un paranoïaque archaïque inventant une fantasmatique « théorie du complot ».

Malgré les inlassables réponses de Chomsky à ses « détracteurs parisiens » depuis presque trente ans, rien n’y fait. La toute récente publication d’une étude très complète sur Chomsky par les cahiers de l’Herne (*), avec des documents complets et précis qui démontent toutes les accusations, n’a eu aucun écho dans les médias français.

Mais si nos penseurs se contentent de le disqualifier et de l’occulter sans argumenter, après tout rien d’étonnant. C’est précisément les mécanismes idéologiques qui structurent l’ordre du monde présent que Noam Chomsky ne cesse de mettre à nu en décryptant les non-dits et les manipulations du discours ambiant. Car c’est le contrôle de la pensée dans les sociétés démocratiques, qu’il s’attache à dévoiler. Ainsi à l’issue d’une conférence une étudiante interpelle Chomsky :
« J’aimerai savoir comment l’élite contrôle les médias ?
Comment contrôle-t-elle General Motors ? L’élite n’a pas à contrôler Général Motors. Ça lui appartient »

« Par le pouvoir, l’étendue, l’originalité et l’influence de sa pensée, Noam Chomsky est peut-être l’intellectuel vivant le plus important » Cette phrase extraite d’un article du New York Times, figurait sur la couverture d’un de ses livres. « Mais attention dit Chomsky, dans le texte original elle est suivi de ceci : « Si tel est le cas, comment peut-il écrire des choses aussi terribles sur la politique étrangère américaine ». On ne cite jamais cette partie. Alors qu’en fait, s’il n’y avait pas cette deuxième phrase, je commencerai à penser sérieusement que je fais fausse route. »

Voilà bien longtemps que la petite équipe de Là-bas espérait rencontrer Noam Chomsky. A presque 80 ans, il travaille une centaine d’heures par semaine, entre livres, articles, interventions publiques et échanges avec des centaines de correspondants à travers le monde. S’il répond à toutes les sollicitations son emploi du temps est minuté plusieurs mois à l’avance. Il accueille les visiteurs dans son bureau du MIT. Au mur un grand portait de Bertrand Russel et une poupée de chiffon du Chiapas figurant le Sous-Commandant Marcos.

« Je n’essaie pas de convaincre mais d’informer. Je ne veux pas amener les gens à me croire, pas plus que je ne voudrais qu’ils suivent la ligne du parti, ce que je dénonce - autorités universitaires, médias, propagandistes avoués de l’Etat, ou autres. Par la parole comme par l’écrit, j’essaie de montrer ce que je crois être vrai, que si l’on veut y mettre un peu du sien et se servir de son intelligence, l’on peut en apprendre beaucoup sur ce que nous cache le monde politique et social. J’ai le sentiment d’avoir accompli quelque chose si les gens ont envie de relever ce défi et d’apprendre par eux-mêmes »


On s’en doute Chomsky n’est pas seul. Tout un monde d’activistes, de chercheurs, de journalistes, ou de citoyens engagés se retrouvent dans sa manière de poser les problèmes sociopolitiques. Ainsi à Montréal nous rencontrons Normand Baillargeon, professeur en sciences de l’éducation et auteur d’un « Petit cours d’autodéfense intellectuelle » avec des dessins de Charb. A Bruxelles, Jean Bricmont, professeur de physique théorique à l’Université catholique de Louvain auteur de « A l’ombre des Lumières », avec Regis Debray (Odile Jacob, 2003) et « Impérialisme Humanitaire » (Aden, 2005). A Cap Cod, Michael Albert, rescapé de l’immense bouillonnement des années 60, animateur du réseau Z Net (**) et concepteur du « participalisme », une de ces vastes utopies comme on ose plus (ou pas encore) en concevoir.

« Le pouvoir nous veut triste », disait Gilles Deleuze. La dernière question porte sur le progrès et ce que nous pouvons espérer changer. « Le progrès dans les affaires humaines est un peu comme l’alpinisme, répond Noam Chomsky, vous voyez un sommet, vous peinez à y monter et soudain vous découvrez que plus loin se trouvent d’autres pics que vous n’aviez peut-être pas imaginés ».







La Manufacture du Consentement
Noam Chomsky, et quelques intervenants bien placés pour nous parler du sujet, nous expliquent comment et pourquoi les médias manipulent l'opinion publique en sélectionnant l'information. Ils décortiquent le fonctionnement des organes de presse et mettent à jour les techniques subtiles qu'ils utilisent.






Un repaire entièrement dédié au film de Olivier Azam et Daniel Mermet Chomsky et Compagnie :

(Cliquez ci-dessous)





POWER and TERROR
Noam CHOMSKY







Quelques livres pour aborder Noam Chomsky, Jean Bricmont, et Normand Baillargeon… Et les autres films.


Noam Chomsky

Depuis les années 50, Noam Chomsky a publié des milliers d’articles, des centaines d’ouvrages, ses conférences et entretiens ont été reproduites dans le monde entier, dans toutes les langues… Voici justes quelques ouvrages d’actualité, permettant d’aborder simplement la pensée critique de Chomsky :

- La Fabrication du consentement (édition complète - Agone – Oct 2008) NOUVEAU

- De la guerre comme politique étrangère des Etats-Unis* (Agone-2004) Prologue de Howard Zinn - Postface de Jean Bricmont.
- Comprendre le Pouvoir, l’indispensable de Chomsky (3 volumes – éditions Aden)
- Cahier de l’Herne N°88 : Chomsky (dirigé par Jean Bricmont et Julie Franck – 2007)

- L’ivresse de la force (Fayard - 2008) NOUVEAU
- La doctrine des bonnes intentions (Fayard – 2007)
- 11-9 Autopsie des terrorismes ( Serpent à plumes - 2002)
- Deux heures de lucidité : Entretiens avec Denis Robert et Weronika Zarachowivz (Les arênes – 2001)


Films
-Manufacturing Consent (de M. Achbar et P. Wintonick) - 1992 (Ed. K-films)
- Pouvoir et Terreur (de J. Junkerman)-2002 (Ed. K-films)


Jean Bricmont


Jean Bricmont est professeur de physique théorique à l’Université Catholique de Louvain. Il est aussi l’auteur, avec l’Américain Alan Sokal, de Impostures intellectuelles, qui démystifie l’usage intempestif du langage scientifique et « les extrapolations abusives des sciences exactes aux sciences humaines » (éd. Odile Jacob, 1997). En 2003, il publie À l’ombre des Lumières, avec Régis Debray (éd. Odile Jacob).

Si être « Chomskien » avait un sens, on dirait de Jean Bricmont qu’il en est un des plus actifs en Europe. Jean Bricmont préfère défendre simplement l’utilité d’un intellectuel qui « permet de penser autrement, de sortir d’un cadre de pensée insuffisamment rationaliste, de démonter l’idéologie dominante. »

En janvier 2007, il codirige un Cahier de L’Herne avec Julie Franck (ouvrage collectif) consacré à Noam Chomsky. C’est d’ailleurs cet ouvrage qui fut le déclencheur de la série d’entretiens réalisés pour Là-bas si j’y suis.

Dans la continuité des analyses de Noam Chomsky, Jean Bricmont a publié en 2005 : Impérialisme humanitaire. Droits de l’homme, droit d’ingérence, droit du plus fort ?

- Impérialisme humanitaire. Droits de l’homme, droit d’ingérence, droit du plus fort ? ( Aden -2005)

- Impostures intellectuelles, co-écrit avec Alan Sokal (éditions Odile Jacob, Paris -1997)

- À l’ombre des Lumières, co-écrit avec Régis Debray (éd. Odile Jacob 2003).

- Coordination des Cahiers de l’Herne N°88 (avec Julie Franck)


Normand Baillargeon



Normand Baillargeon est professeur en Sciences de l’éducation à l’Université du Québec à Montréal, essayiste, militant libertaire et collaborateur de revues alternatives. Poursuivant l’idée de Noam Chomsky (« Si nous avions un vrai système d’éducation, on y donnerait des cours d’autodéfense intellectuelle »), il a imaginé à quoi cela pourrait ressembler et rédigé un Petit cours d’autodéfense intellectuelle qui a été un grand succès en librairie en 2007 (Lux éditeur).

En 2004, Normand Baillargeon avait publié L’ordre moins le pouvoir : histoire et actualité de l’anarchisme (Agone), dans lequel on retrouve Noam Chomsky à une place de choix, entre Bakounine et Kropotkine.

En 2005, il s’attaque au premier tome de Education et liberté puis la même année Les Chiens ont soif (Lux éditeur).
Il est aussi passionné de traductions, parmi lesquelles La chasse au Snark de Lewis Carroll (Édition Bilingue, Lux), Les mémoires d’un esclave de Frederik Douglass, et récemment l’étonnant et toujours d’actualité Propanganda, comment manipuler l’opinion en démocratie de Edward R. Bernays, que Normand Baillargeon a pertinemment préfacé (Zones).
Entre deux cours, deux conférences, deux publications, l’hyper-activiste Normand Baillargeon collabore régulièrement au journal Le Couac et à la revue À bâbord ! (au Québec), et a rejoint les contributeurs de la revue française Siné Hebdo.

- Petits cours d’autodéfense intellectuelle (Lux éditeurs-2007)
- L’Ordre moins le pouvoir, Histoire et actualité de l’anarchisme - Édition revue & augmentée (Agone) NOUVEAU
- Education et liberté (Lux édition)
- Les Chiens ont soif (Lux édition)
- Préface de « Propanganda, comment manipuler l’opinion en démocratie » de Edward Bernays (Zones)
Normand Baillargeon est aussi passionné de traductions, parmi lesquelles, il a contribué à déterrer « La chasse au Snark » de Lewis Carrol ( Édition Bilingue, Lux), « les mémoires d’un esclave » de Frederik Douglass…


ENTRETIEN AVEC DANIEL MERMET
au sujet de son émission
Là Bas si j'y suis














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